Beau chêne

Publié le par Julie Wasselin

Chêne rouvre de Villeperdue. Photo Christian Nicolas.

Chêne rouvre de Villeperdue. Photo Christian Nicolas.

Pour Isabelle

         Avec son encolure de bison, il est énorme, solitaire et se rit du temps qui s’escrime en vain sur son cuir plusieurs fois centenaire.
         C’est un rouvre, une force, une érection.
         Pas un de ces malingres qui tendent des doigts décharnés vers le ciel.

         Dans cette plaine de l’Indre, il est un repère, et c’est vers lui que je pousse mon cheval d’un balancement de reins vigoureux.
         Nous lui rendons visite quatre fois l’an, appareil-photo en bandoulière afin de graver sur l’argent sa prodigieuse silhouette au printemps, à l’automne, en été, puis aussi dans la neige en hiver.
         C’est un pèlerinage.
         Il est l’alpha et l’oméga de cet amour que je porte aux arbres et aux forêts, ces cathédrales où me traverse avec bonheur un sentiment sacré.
         Quand j’apprends qu’il me faudra quitter l’Indre et qu’il faudra « le » quitter, j’enfourche le cheval et lui demande de m’y ramener.
         Point d’arbre à l’horizon…
         N’y croyant pas, je mets le cheval au galop.
         Nous avons fait fausse route, évidemment.
         Mais non, la route est bonne et c’est l’homme qui n’est pas bon…
         Un homme a tué mon chêne, et Beau chêne est tombé.

         Têtes basses, nous repartons, et soudain, j’entends Beau chêne murmurer :
         - Puisque tu t’en vas, tu sais… je ne pouvais pas rester.

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